BLOCS

Chaque semaine, votre condensé d’actualité utile sur le commerce international.

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Par Mathieu Solal, Antonia Przybyslawski et Clément Solal
24 janv. · 9 mn à lire
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Le "Friend-shoring", un mouvement de fond

Mais aussi - Colère agricole, Trump 2, CMA CGM se diversifie

BLOCS#8 Bonjour, nous sommes le mercredi 24 janvier et voici le huitième épisode de votre condensé d’actualité utile sur le commerce international. Suivez-nous également sur Twitter et LinkedIn.


Super-bloc

Alors que Bruxelles s’apprête à présenter un nouveau paquet législatif destiné à préserver la « sécurité économique » de l’UE, focus cette semaine sur un concept en vogue: le “friend-shoring”, qui désigne le choix de privilégier le commerce avec ses alliés politiques et économiques, aux dépens des autres. Une tendance qui s’est affirmée ces dernières années, sur fond de guerre commerciale sino-américaine, mais qui n’est pas sans rencontrer certaines limites, tenant, entre autres, à la difficulté de l’art de bien choisir ses amis.

Pose décontractée au sommet du G7 de Hiroshima (Japon), le 19 mai 2023.Pose décontractée au sommet du G7 de Hiroshima (Japon), le 19 mai 2023.

EXPRESSION EN VOGUE □ La Commission européenne publie ce mercredi un paquet législatif destiné à assurer la « sécurité économique » de l’UE. Cette nouvelle série de mesures fait suite à la récente mise en place d’un outil de lutte contre les subventions étrangères déloyales et d’un instrument anti-coercition économique. Autant de projets qui témoignent de la volonté de l’UE de mieux défendre ses intérêts, notamment face à la Chine et à la Russie, dans un contexte international toujours plus conflictuel.

En Europe comme ailleurs, cette propension nouvelle à montrer les dents face aux rivaux et aux ennemis s’accompagne logiquement d’un mouvement de rapprochement vis-à-vis des alliés, que d’aucuns nomment le “friend-shoring”. Une expression utilisée pour la première fois en avril 2022 par la Secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen.

Contraction de “friends” (les amis) et “offshoring” (la délocalisation), cette expression en vogue désigne une pratique commerciale de plus en plus répandue consistant à concentrer les maillons des chaînes d’approvisionnement de ses entreprises nationales dans des pays considérés comme des alliés politiques et économiques.

En d'autres termes, il s'agit de ne plus délocaliser uniquement en fonction de critères économiques tels que les coûts de production et la main-d'œuvre, mais de prendre aussi en compte d'autres éléments afin de minimiser les risques liés à d'éventuels conflits ou à des retournements de situation.

AU GRÉ DES CRISES □ Cette tendance forte du commerce international s’est affirmée au gré des récentes crises économiques et des tensions sur les chaînes d'approvisionnement mondiales, notamment provoquées par la guerre commerciale sino-américaine, la pandémie de Covid-19 et l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

Ainsi, depuis le début du conflit en Ukraine les échanges commerciaux entre pays dits « amis » ont augmenté de 6%, au détriment des échanges avec des pays géopolitiquement éloignés, qui ont diminué de 4 à 6%, selon le dernier rapport de décembre 2023 de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED). 

Concepteurs du “friend-shoring”, les Américains sont aussi parmi les premiers à le mettre en oeuvre, pour mieux réduire leur dépendance à la Chine. Ainsi, alors que leurs échanges avec le pays dirigé par Xi Jinping ont diminué de près de 2% entre le quatrième trimestre 2022 et le quatrième trimestre 2023, ceux avec l’UE ont augmenté de 1,3% sur la même période.

Une tendance insufflée politiquement par la stratégie dite « Chine+1 » à travers laquelle Washington encourage les entreprises nationales à trouver au moins un autre fournisseur que l’ogre asiatique sur tous les maillons de leurs chaînes d’approvisionnement.

Graphique de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED)Graphique de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED)

GRANDS GAGNANTS □ Allié et voisin de l’Oncle Sam, le Mexique bénéficie logiquement de cette nouvelle donne. Le pays est ainsi devenu le principal partenaire commercial des États-Unis en 2023, avec 15% de parts du marché américain. L'Inde apparaît également comme l’une des grandes gagnantes, grâce à une structure de coûts compétitive, une main-d'œuvre qualifiée et un marché intérieur porteur. Selon un récent rapport du Boston Consulting Group (BCG), le commerce extérieur indien devrait croître de 6,3 % par an en moyenne, soit plus du double de la moyenne mondiale.

Au-delà des “amis'“, la tendance touche aussi les pays qui restent neutres dans leurs rapports avec la Chine, et ne partagent pas forcément les valeurs démocratiques occidentales. Ainsi, selon les chiffres de The Economist, les exportations des autocraties autres que la Chine vers les pays riches ont bondi de 30% quand celles en provenance des démocraties vers les pays riches n’ont augmenté que de 25%.

Les relations entre l'Occident et les pays du Sud et du Sud-Est, tels que l’ASEAN, qui regroupe dix pays d’Asie du Sud-Est (à l’exception de la Chine), dont une majorité de régime non-démocratiques, devraient par ailleurs fortement s'intensifier, selon le rapport du BCG déjà cité. Ces pays sont d’ailleurs souvent eux-mêmes dépendants de la Chine et peuvent même parfois simplement servir d’intermédiaires passifs.

Autre illustration de la propension de l’Occident à coller précipitamment l’étiquette d’ami à un partenaire: mise sous pression par le chantage au gaz russe, l’UE n’a pas hésité à se tourner, entre autres, vers le Qatar ou l’Azerbaïdjan, deux pays qu’on peut difficilement qualifier de démocratiques ou même d’amicaux, pour compenser la chute des approvisionnements en provenance de Russie.

Nécessité fait loi, aussi bien côté de Bruxelles que de celui de Moscou. Entre le quatrième trimestre 2022 et le quatrième trimestre 2023, la Russie a ainsi accru sa dépendance vis-à-vis de la Chine de 8 % et réduit de 6 % celle à l’égard de l'UE. Une tendance qui ressemble bien plus à une vassalisation qu’à une illustration du “friend-shoring”.

RÉALITÉ COMPLEXE □ Le concept se heurte également à la réalité complexe des relations commerciales déjà établies. En termes de quantité de production, de qualité et de délais de livraison, la Chine reste souvent compétitive. Cet aspect est clairement illustré par l'exemple du géant américain Apple, qui a annoncé en 2023 son intention de produire 5 à 10 % de ses nouveaux modèles d’iPhone en Inde. Cependant, selon les analyses de Bloomberg Intelligence, il faudra huit ans pour qu’Apple déplace en Inde ne serait-ce que 10 % de sa capacité de production actuelle en Chine.

Dans la grande course à l’amitié, l’Union européenne a par ailleurs ses propres problèmes. « L'UE tente d’améliorer ses relations commerciales en imposant de nouvelles lois, comme la directive sur le travail forcé, celle sur le devoir de vigilance ou encore le règlement sur la déforestation importée, explique Zach Meyers, chercheur du Center for European Reform. Ces mesures ont toutefois suscité une vive réaction de la part des partenaires commerciaux potentiels de l'Europe, qui y voient une forme d'"impérialisme réglementaire" ».

« En fin de compte, si l'objectif de l'UE est de minimiser la dépendance excessive à l'égard d'un seul partenaire commercial, il faudra faire des affaires avec d'autres régimes problématiques, analyse en outre le chercheur de ce think tank basé à Londres. Par ailleurs, les lois européennes qui exigent la transparence de la chaîne d'approvisionnement rendent beaucoup plus difficile leur diversification : il est beaucoup plus facile de se conformer à ces lois si l'on a moins de fournisseurs avec lesquels traiter ».

« Dans un paysage géopolitique instable et polarisé, le friend shoring est également plus exposé au risque d'échecs de mise en œuvre, complète Malorie Schaus, chercheuse au CEPS. Il est donc important de rester vigilant quant au degré d'ouverture et de diversification de cette politique, qui ne doit pas prendre une tournure essentiellement protectionniste qui contribuerait à une fragmentation encore plus grande de l'économie mondiale ».


Blocs-notes

MALAISE AGRICOLE □ La vague de mécontentement qui monte en Europe parmi les agriculteurs, de l’Allemagne à la Roumanie, en passant par la France, trouve des éléments déclencheurs différents en fonction des pays.

Outre-Rhin, où des milliers de personnes ont déferlé sur Berlin lundi 15 janvier, après des semaines de manifestations, c’est la fin progressive d’un avantage fiscal sur le gazole agricole qui a mis le feu aux poudres.

En Roumanie, la fronde est surtout nourrie par la concurrence des produits issus de l’Ukraine voisine, sujet de tension qui touche tout l’est de l’UE. Ainsi, la semaine dernière, les gouvernements polonais, hongrois, bulgare, slovaque, et donc, roumain ont souligné la « souffrance considérable » de leurs agriculteurs depuis que l’UE a levé les quotas d’importation et les droits de douane sur les importations de céréales ukrainiennes, dans une lettre commune notamment adressée au commissaire européen au Commerce.

Plus généralement, le malaise du monde agricole en Europe comporte une dimension commerciale. Car si ses éléments déclencheurs sont variés, la colère cible partout les mesures climatiques décidées au sein de l’UE, auxquelles on reproche de désavantager les agriculteurs du Vieux continent face à leurs concurrents internationaux. Le Pacte vert européen de l’UE fixe en effet des objectifs de réduction d’usage des pesticides comme de développement de l’agriculture biologique, ou de protection de la biodiversité. 

Les représentants des agriculteurs fustigent en outre l’ouverture relative de l’UE à la concurrence, dans ce secteur fragile. Dans l’Hexagone, où les revendications sont par ailleurs multiples, Arnaud Rousseau, le président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), mène ainsi la charge contre le manque de « cohérence » du cadre européen.

« On ne peut pas avoir d'un côté des accords commerciaux qui [permettent d'importer] des produits avec des conditions de production qui ne sont pas les nôtres et de l'autre exiger de l'agriculture française [...] des conditions de production qui ne sont pas tenables », a-t-il lancé lundi 22 janvier sur France Inter

Dans son viseur notamment, l’accord de libre-échange récemment ratifié (BLOCS#1) avec la Nouvelle-Zélande, pays exportateur de lait, d’agneau ou encore de bœuf. En 2017, le Ceta, cet autre accord commercial de l'UE et le Canada, avait provoqué des craintes encore plus vives chez les agriculteurs. Six ans après, « les exportations françaises vers le Canada ont progressé de 43 %. Notamment grâce à l'agroalimentaire (+ 57 %) », relevait Le Point en décembre dans un article battant en brèche ces critiques

En tout état de cause, la sensibilité du monde agricole en la matière est plus que jamais de nature à affecter les négociations commerciales en cours. La France, déjà frileuse dans le dossier, devrait notamment redoubler de prudence sur les termes du projet d’accord de libre-échange toujours sur la table entre l’UE et les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay) (BLOCS#2). Celui-ci suscite en particulier la levée de bouclier de la filière française de l’élevage.


TARIFF MAN □ Donald Trump est en train de survoler les primaires républicaines en vue de l’élection présidentielle américaine du 5 novembre prochain. Certains commentateurs misent déjà sur une deuxième victoire du sulfureux milliardaire dans un peu plus de neuf mois.

« Il y a 60% de chances que Trump revienne à la Maison Blanche », estimait l’historien britannique et observateur avisé de la politique américaine, Niall Ferguson, en amont de la primaire, dans un entretien à la revue le Grand Continent. Cette perspective génère un vent d’inquiétude parmi les milieux d’affaires internationaux, sondés la semaine dernière par Le Figaro au 54ème Forum de Davos.

Dans la station des Alpes suisses, où se sont réunis plus de 800 P-DG et 60 leaders politiques, le nom du « Tariff man » (ou « homme des droits de douane »), comme l’ancien président des États-Unis aurait pris coutume de se présenter, a été au centre des discussions.

Donald Trump aurait déjà confectionné pour son son hypothétique deuxième mandat un « arsenal entier de mesures protectionnistes », telles que des droits de douane de 10 % sur … tous les biens importés, d’où qu’ils proviennent donc, indique le New York Times.

Mais ses vélléités les plus extrêmes ciblent évidemment la Chine. Trump promet ainsi de mettre fin au statut de « nation la plus favorisée » accordé à Pékin lors de son entrée dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en 2001. Cette clause est une mesure de non-discrimination, permettant à un État de bénéficier des mêmes avantages commerciaux que tout autre État, pour l’importation d’un produit similaire.

Une telle initiative affecterait la relation bilatérale sino-américaine, les deux blocs ayant échangé pour 664,4 milliards de dollars de biens et services en 2023. Mais pas seulement: cette décision provoquerait aussi une profonde remise en cause des règles multilatérales continuant d’encadrer le commerce. 

En 2018, Donald Trump avait déjà déclenché une guerre commerciale avec la Chine. Washington avait au total imposé des droits de douane allant jusqu’à 25 % sur plus de 300 milliards de dollars d’importations.

Taxes sur les vins et spiritueux français, conflits sur l’acier et l’aluminium … Les attaques commerciales avaient ensuite visé l’UE, qui a aussi de quoi craindre son retour . 

Son successeur n’a certes pas fondamentalement modifié la ligne protectionniste de Trump, en particulier pour ce qui est de la Chine. L’Inflation Reduction Act, le plan d’investissements publics massifs de l’administration Biden en faveur des industries vertes, « est ainsi, à certains égards, considéré comme plus protectionniste que toutes les politiques tarifaires de Trump », relève Niall Ferguson dans le Grand Continent. 

Cependant, aux yeux des plus inquiets un deuxième mandat Trump serait encore plus radical, plus imprévisible, et donc susceptible de déstabiliser la planète … au-delà du commerce. « Il n’y aurait pas d’establishment républicain ou de généraux du Pentagone pour tempérer ses actions », explique Niall Ferguson.

« Le Trump de 2024 n’est plus le même que celui de 2016, il est encore plus sans contrainte. S’il est élu, ce sera le chaos total parce qu’il prendra des décisions folles, s’alarmait à Davos le PDG d’une très grande banque américaine cité par le Figaro. Comme citoyen tout comme businessman, je pense que ce sera un désastre ».


Mini-blocs

Selon les informations de l’Agefi, le groupe marseillais CGA CGM a déposé le 19 janvier une offre de près de 567 millions d’euros pour le rachat du britannique Wicanton, spécialiste de la logistique (sous-traitance et entreprosage). Cette offre devrait être acceptée très prochainement par ses actionnaires. Le Groupe de Rodolphe Saadé attend également le feu vert des autorités européennes pour la reprise, moyennant 5 milliards d’euros, de Bolloré Logistics, autre géant du secteur. Ces deux acquisitions porteront à 25 milliards de dollars le chiffre d’affaires de CGA CGM dans la logistique. Un secteur bien moins cyclique que son activité originelle d’armateur, laquelle est notamment sensible au récent retournement du marché du fret (BLOCS#7) et à la hausse de l’insécurité en mer Rouge.

L’Allemagne, la France et l'Italie, ont obtenu lundi 21 janvier un accord de principe de la part des vingt-sept ministres des affaires étrangères de l’UE, pour mettre en place une opération navale européenne en mer Rouge afin de faire face à la menace que représentent les attaques des rebelles Houthis (BLOCS#4). Selon les informations du Financial Times, la mission, baptisée « Aspides », qui pourrait être mise en place dès le mois de février, serait limitée à la défense des navires marchands contre les missiles et les drones dirigés contre eux. Cette mission devrait en outre utiliser les structures et les capacités déjà existantes de l’opération « Agenor », à laquelle les trois pays participent au large des côtes iraniennes. Cette initiative s’inscrira en complément de l’opération « Prosperity Guardian », la coalition anti-houthiste mise en place par les États-Unis en décembre dernier. qui mène des attaques contre les rebelles au Yémen depuis deux semaines. En riposte, les Houthis ont récemment commencé à prendre directement pour cible les navires commerciaux et les navires de guerre américains en mer Rouge. Du fait de ces violences persistantes, la plupart des cargos évitent toujours la zone, préférant effectuer le long détour par le cap de Bonne-Espérance, pour relier l’Europe et l’Asie de manière sûre.

« L’ Allemagne n’est pas un homme malade mais simplement un homme fatigué » a plaidé son ministre des Finances, Christian Linder, lundi à Davos. Le pays, en récession en 2023, est de fait menacé de décrochage. Son PIB n’a progressé que de 0,7% depuis 2019, contre 4% pour l’UE, 7,5% pour les États Unis et 20,1% pour la Chine. Trois facteurs ont affaibli l’économie allemande, très dépendante de son industrie et ses exportations: les prix élevés, notamment dans le secteur de l’énergie, la dégradation des conditions de financement, avec une forte hausse des taux d’intérêt toujours en cours, et une baisse générale de la demande. La production industrielle, qui pèse à elle seule près de 20% du PIB allemand, a reculé de 2% en 2023, avec une chute de 20% dans le secteur très énergivore de la chimie. Enfin, les exportations, qui pèsent pas moins de 48% du PIB, ont chuté de 5% en 2023. En cause, une demande mondiale en berne et l’arrivée des constructeurs automobiles chinois en Europe. L’Allemagne souffre enfin d’un manque cruel « d’investissements d’avenir », selon plusieurs économistes.

Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) a présenté la semaine dernière à Davos une initiative à destination de l’Afrique, baptisée Timbuktoo et visant à investir un milliard d’euros de capitaux publics et privés en dix ans dans des start-up locales. Objectif: créer « 10 millions de nouveaux emplois dignes », selon le communiqué du PNUD. Le continent ne représente aujourd’hui que 0,2 % des jeunes entreprises dans le monde en termes de valeur. La quasi-totalité du capital-risque injecté dans les start-up du continent provient en outre de l’étranger et revient à 83 % à seulement quatre pays : Nigeria, Kenya, Afrique du Sud et Egypte. Les dirigeants africains présents au Forum économique mondial ont par ailleurs beaucoup insisté sur leur volonté d’attirer les investissements plutôt que l’aide au développement, comme le relate Le Monde.

Un important gisement de lithium vient d’être découvert dans le Sichuan, au sud-ouest de la Chine, a rapporté jeudi Xinhua News Agency, évoquant une réserve de près d’un million de tonnes. Il s’agirait ainsi du plus grand gisement de lithium à pegmatite d’Asie, selon le ministre chinois des ressources naturelles. La pegmatite est une roche dure qui permet un traitement plus rapide et offre un lithium de qualité supérieure. Ce nouveau gisement vient s’ajouter aux réserves mondiales découvertes, estimées à 22,5 millions de tonnes en 2022, et fait passer la Chine devant l’Argentine au troisième rang dans le classement des pays ayant le plus de réserves de lithium. Le pays dirigé par Xi Jinping reste certes derrière l’Australie et le Chili, pays le plus riche en lithium. La Chine, qui exploite des mines dans ces trois pays, est néanmoins le premier producteur mondial de ce métal. La découverte de la mine du Sichuan lui permettra en outre d’accélérer sa production locale, qui était jusqu’ici d’environ 14 000 tonnes par an. Le lithium est utilisé dans la production des véhicules électrifiés, des batteries (BLOCS#3) et des panneaux solaires, qui ont généré pour 148,89 milliards de dollars d’exportations chinoises en 2023, selon l’administration des douanes de Pékin.


Nos lectures de la semaine

Dans un éditorial publié par Borderlex, le directeur du think tank European Centre For International Political Economy (ECIPE) David Henig appelle à construire un nouveau récit politique positif sur le commerce, dans le contexte des élections à venir en 2024. Évoquant les « peurs compréhensibles » des spécialistes du commerce face à l’hypothèse d’un second mandat de Donald Trump et à la perspective d’un Parlement plus sceptique au libre-échange après les élections européennes, l’auteur appelle les responsables politiques à démontrer l’importance du commerce pour les petites entreprises et les ménages et ses avantages au-delà des considérations économiques. Il cite notamment le règlement anti-déforestation de l’UE qui n’aura « que peu d’effet global si les entreprises se détournent du commerce et n’investissent pas à l’international ».

Dans un éditorial publié par VoxEU, l'économiste Richard Baldwin montre comment la Chine s'est hissée au rang de principale superpuissance manufacturière mondiale, surpassant la production des neuf plus grands fabricants réunis. Comme l’illustre son succès récent dans le secteur des véhicules électriques, le vaste socle industriel chinois confère à l’Empire du Milieu un avantage concurrentiel dans pratiquement tous les secteurs. Partant, l'auteur remet en question la pertinence de l’idée de découpler les économies nationales de celle de la Pékin, soulignant que tous les principaux fabricants mondiaux dépendent de la Chine pour au moins 2% de leurs intrants industriels.


Cette édition a été préparée par Clément Solal, Antonia Przybyslawski, Mathieu Solal, Jean-Marc Solal et Sophie Hus.

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