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Par Mathieu Solal, Antonia Przybyslawski et Clément Solal
13 déc. · 3 mn à lire
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Promouvoir le commerce international en France, un sport de combat

Retour sur le débat organisé vendredi dernier par la faculté des études internationales et interculturelles CY Cergy Paris Université, en partenariat avec BLOCS.

LE COMMERCE INTERNATIONAL À CERGY Bonjour, nous sommes le vendredi 13 décembre et voici un numéro spécial de votre newsletter du commerce international. Suivez-nous sur LinkedIn.

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Promouvoir le commerce international en France, un sport de combat

Incertitude politique et budgétaire, conjoncture économique difficile, déficit commercial structurel… Les temps sont durs pour les artisans de l’attractivité de la France et du développement international de ses entreprises. Vendredi dernier, BLOCS a pu faire le point sur cette situation délicate, en posant toutes ses questions à deux experts locaux, au cours d’un débat organisé par la faculté des études internationales et interculturelles CY Cergy Paris Université. Ces échanges ont aussi permis de mieux discerner les atouts français et la dynamique spécifique du Val d’Oise avec deux experts locaux. Retour sur cette discussion animée par notre cofondateur Mathieu Solal avec Michel Jonquères, membre élu de la Chambre de Commerce et de l’Industrie du Val d’Oise et Jean-François Benon, directeur du CEEVO, l’Agence de Développement et d'Attractivité des territoires du Val d'Oise.

De gauche à droite, Jean-François Benon, Mathieu Solal et Michel Jonquères © Diya Diarra

INCERTITUDE □ Difficile d’avancer dans le brouillard. En ce vendredi 6 décembre, six mois après la dissolution de l’Assemblée nationale et deux jours après le vote d’une motion de censure qui jette encore plus le pays dans l’incertitude, la situation politique s’invite forcément au cœur du débat, sur le campus de CY Cergy Paris Université.

« Je suis évidemment sensible à ce qui est en train de se passer au niveau politique, en particulier vis à vis de l’effet sur l’image de notre pays à l’étranger et surtout auprès des investisseurs étrangers », explique Jean-François Benon, directeur du CEEVO, l’Agence de Développement et d'Attractivité des territoires du Val d'Oise.

« Parmi les critères qui fondent le choix d’un site pour implanter une entreprise ou apporter un investissement productif, il y a le climat des affaires, le contexte politique, la sécurité juridique, ou encore la sécurité fiscale, poursuit M. Benon. Ces dernières années, la France a gagné des parts de marché dans cette attractivité internationale, mais on peut légitimement avoir des craintes pour la suite ».

L’incertitude a déjà des conséquences au niveau national, comme le note la récente édition spéciale du baromètre du cabinet de conseil EY (BLOCS#40). Les secousses sont aussi perceptibles au niveau local.

« Dans le Val d’Oise, on a environ 1200 entreprises à capitaux majoritairement étrangers, explique encore le directeur du CEEVO. Du fait de la présence de l’aéroport Charles de Gaulle et de la proximité de Paris, on est un département très sensible aux investissements internationaux ».

Selon M. Benon, les inquiétudes exprimées par les investisseurs étrangers touchent principalement le maintien ou non du généreux dispositif du crédit impôt-recherche, l’évolution du coût du travail, le climat social, mais aussi l’état du marché français et européen.

ÉCOSYSTÈME COMPLET □ L’incertitude touche également le soutien public à l’export. Menacé de coupes sèches dans le projet budgétaire du gouvernement Barnier (BLOCS#35), l’écosystème mené par la Team France Export, qui constitue l’un des plus ambitieux et complets au monde, ne sait pas à quelle sauce il va être mangé, au cours de l’exercice budgétaire 2025.

« Il faut bien se rendre compte des facilités qu’offre la France pour l’instant, pose Michel Jonquères, membre élu de la Chambre du Commerce et de l’Industrie du Val d’Oise et ancien président de la section départementale du MEDEF. Quand une entreprise veut se lancer à l’export, Business France peut l’aider à entrer en contact avec de potentiels clients. Si l’entreprise a besoin d’argent, la BPI peut lui prêter 60% de la somme. En cas d’échec, l’entreprise ne devra rembourser que 30% de la somme prêtée - avant elle ne devait rien rembourser du tout ! ».

« Il faut aussi évoquer la qualité des informations données par les services des douanes et le rôle du réseau des conseillers du commerce extérieur, poursuit M. Jonquères, lui-même conseiller du commerce extérieur depuis 1979. Nous sommes 4500 dans le monde, et nous soutenons individuellement les entrepreneurs qui veulent se lancer à l’export ».

Pour inciter les acteurs à se lancer, M. Jonquères ne manque pas d’arguments : « toute entreprise qui exporte a en moyenne une croissance deux fois supérieure, obtient des points de rentabilité supplémentaires, a beaucoup plus tendance à innover, et finit par grossir et donc proposer des postes plus intéressants, et ainsi embaucher de nouveaux talents », décline-t-il.

Les étudiants de bonne humeur de la faculté des études internationales et interculturelles CY Cergy Paris Université. © Diya Diarra

VALORISER L’ÉCHEC UTILE □ Malgré ces arguments, la France affiche un déficit commercial structurel (BLOCS#11) et autour de 140 000 entreprises exportatrices, loin de l’objectif de 200 000 fixé par le gouvernement pour 2030, et loin de l’Italie et de l’Allemagne, où ce chiffre est respectivement deux et trois fois plus élevé.

Tant M. Jonquères que M. Benon, lui aussi conseiller du commerce extérieur, associent cette faiblesse française à des causes d’ordre psychologique et culturel - complexes liés notamment à un niveau faible en anglais et à une mauvaise connaissance des pays étrangers, croyance selon laquelle l’export serait réservé aux grandes entreprises industrielles…

« Les Allemands exportent trois fois plus que nous pour trois raisons, illustre M. Jonquères. La première c’est le Made in Germany, qui demeure un gage de qualité dans l’inconscient collectif international. Même si c’est plus cher, les consommateurs achètent allemand. Deuxièmement, ils perfectionnent le banal, de manière très pragmatique. Et troisièmement, ils valorisent l’échec utile ».

Une vraie différence avec la France, où, selon M. Jonquères, « celui qui échoue devient un paria. C’est un grand problème français et une des raisons pour lesquelles les entrepreneurs ont peur d’exporter. Alors qu’exporter, ce n’est pas si difficile que ça, en tout cas pas plus difficile que de gérer une entreprise ! », affirme-t-il.

CULTIVER LA CURIOSITÉ □ Les deux intervenants se satisfont toutefois que de plus en plus de cursus universitaires dédiés au commerce international soient créés. Interrogé par une étudiante sur la manière de choisir un secteur pour se lancer à l’export, M. Benon, lui aussi conseiller du commerce international, explique :

« Ce n’est pas à moi de répondre à cette question, mais à vous d’être à l'affût. Exporter, c’est un état d’esprit. Déjà, il faut avoir l’envie. Et pour avoir l’envie, il faut avoir la curiosité. Voyagez, lisez, écoutez, tout en gardant un réflexe d’esprit critique. Une fois que vous vous serez entraîné à ça, vous aurez trouvé des idées et vous trouverez des projets ».

« Deuxièmement, l’export, c’est le contact avec des cultures et des manières de voir et de penser différentes, continue M. Benon. Si vous n’avez pas le goût de l’interculturel, ça bloque. Si vous voulez exporter avec la vision d’un Français de France qui est très bien dans son pays et n’a pas envie d’aller ailleurs, cela ne fonctionnera pas. Ensuite, seulement, vous pourrez choisir votre secteur, en gardant à l’esprit que tout peut s’exporter, y compris des services, du savoir-faire, à la seule condition que ce soit un produit de bonne qualité ».


Cette édition a été préparée par Clément Solal, Antonia Przybyslawski, Mathieu Solal et Sophie Hus.

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