Focus sur le positionnement du Rassemblement national (RN) et de l'AfD en matière commerciale, mais aussi sur les conséquences à prévoir des élections européennes sur la politique industrielle de l'UE et l'explosion des importations en Europe de véhicules électriques chinois.
BLOCS#27 □ Bonjour, nous sommes le mercredi 12 juin et voici le vingt-septième épisode de votre condensé d’actualité utile sur le commerce international. Suivez-nous également sur LinkedIn.
Les partis de la droite nationaliste et populiste ont gagné du terrain au Parlement européen lors des élections européennes qui se sont tenues de jeudi à dimanche derniers. L’union de l’extrême-droite est toutefois encore loin d’advenir, au vu des positionnements très hétérogènes de ces différents partis sur nombre de sujets, et notamment le commerce international. Cette semaine, BLOCS vous propose une comparaison entre le Rassemblement national (RN), aux portes du pouvoir en France, et l’Alternative für Deutschland (AfD), qui a obtenu la deuxième place outre-Rhin. Cette analyse sera suivi, dans les semaines qui viennent, d’un second focus sur la politique commerciale des partis d’extrême-droite déjà au pouvoir - Italie, Pays-Bas, Hongrie.
Marine Le Pen et Jordan Bardella lors d'un meeting du Rassemblement national, 2 juin 2024 © Jordan Bardella / X
LES ZIGZAGS DU RN □ « Je note que ce mot de protectionnisme que nous avons un peu été seuls à mettre sur la table il y a quelques années est en train de s’imposer comme une arme économique efficace dans le cadre de la mondialisation » lançait Jordan Bardella, président du Rassemblement national (RN), le 8 mai sur France Inter.
Défenseur du néolibéralisme sous Jean-Marie Le Pen, le parti a, sous Marine Le Pen, fait du protectionnisme un élément central de son discours pour conquérir les catégories populaires souvent réticentes à l’ouverture des échanges.
Une tendance qui n’est pas spécifique au RN : « on a constaté une évolution de long terme chez de nombreux partis de la droite radicale vers l’adoption graduelle de lignes plus à gauche socio-économiquement parlant - mais bien sûr avec des positions restrictives sur l’immigration », note Nathalie Brack, politologue enseignante au Collège d’Europe.
La campagne des européennes a cependant marqué une nouvelle inflexion du RN, cette fois plus discrète, au sujet du commerce international.
Après avoir abandonné l’idée du Frexit, puis celle de la sortie de la zone euro en 2017, le parti, qui cherche à étendre son électorat aux chefs d’entreprises, met désormais un peu d’eau dans le vin de son protectionnisme.
« Il ne s'agit pas ici de remettre en cause la nécessité du commerce mondial, indéniable facteur de richesses, mais d’exiger que la réciprocité soit la règle », assurait ainsi Jordan Bardella dans une tribune au ton surprenamment modéré parue le 22 mai dans Les Echos.
De toute évidence, le parti nationaliste adopte un discours à géométrie variable en fonction de son auditoire : quand il revendique volontiers la paternité de la défense du « protectionnisme » sur France inter, ce mot n'apparaît pas une fois lorsqu’il s’adresse aux lecteurs des Echos.
Sur le fond, le parti a modéré certaines de ses propositions. Dans son programme pour la présidentielle en 2022, Marine Le Pen promettait de sortir l’agriculture des traités de libre-échange (ALE) de l’UE. Désormais, le parti défend surtout un moratoire sur la signature de futurs ALE.
De la même manière, l’ex-Front national insistait en 2022 sur ton intention de rétablir des « contrôles aux frontières » de la France pour « s’assurer de la conformité des marchandises qui sont destinées au marché français ». En 2024, cette idée n’a pas été abandonnée, mais elle a été davantage mise en sourdine.
Cela dit, la mise en œuvre de plusieurs pans du programme du RN auraient nécessairement pour conséquences de bouleverser les échanges commerciaux et, a minima, de placer la France en conflit ouvert avec ses partenaires européens.
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