Focus sur la libéralisation des échanges entre l'UE et l'Ukraine, mais aussi sur le nouveau plan chinois pour attirer les investissements étrangers, les implications du rejet du CETA par le Sénat, et la possible reprise du trafic du Canal de Panama.
BLOCS#17 □ Bonjour, nous sommes le mercredi 27 mars et voici le dix-septième épisode de votre condensé d’actualité utile sur le commerce international. Suivez-nous également sur LinkedIn.
Faut-il freiner l’afflux de produits agricoles venus d’Ukraine, afin de calmer la colère des agriculteurs de l’UE, quitte à remettre en cause le peu d'activité économique qui subsiste au sein du pays en guerre ? Ce mercredi 27 mars, les Vingt-Sept se pencheront de nouveau sur cette délicate question. BLOCS vous propose un décryptage de ce casse-tête européen.
Tracteur récoltant des grains de blé dans un champ agricole en Pologne ©Wikimedia Commons
DILEMME □ Dès les débuts du conflit, cela avait été un choix consensuel en solidarité avec l’ami ukrainien victime de l’invasion russe. En mai 2022, l’Union européenne (UE) a décidé de favoriser les importations de produits agricoles provenant de Kiev, l’une des premières puissances mondiales en la matière, via un abaissement des droits de douane à l’entrée du marché unique.
Deux ans plus tard, la question des suites à donner à ces mesures divise les Vingt-Sept, et prend des allures de casse-tête.
D’un côté, l’heure n’est pas à une remise en cause du soutien européen, au contraire : outre-Atlantique, le blocage de l’aide américaine jette une ombre sur les perspectives de l’Ukraine, quand, sur le terrain, l’armée de Kiev est en fâcheuse posture. De l’autre, l'augmentation massive des importations agricoles ukrainiennes, l’une des principales causes de la crise agricole au sein de l'UE.
Certains marchés européens, tels que ceux du sucre, du poulet, des œufs et des céréales ont été fortement perturbés par une explosion des importations de marchandises ukrainiennes, à des prix défiant souvent toute concurrence. Et pour cause, ces productions sont très loin de respecter les hautes normes environnementales de l’UE, ce qui ajoute à la colère paysanne.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : les importations de sucre auraient été multipliées par 10 par rapport à 2021, tandis que celles de céréales ont triplé et celles de volailles doublé.
FREIN D’URGENCE □Si le problème atteint aujourd’hui son paroxysme, il n’est en fait pas nouveau. Voilà près d’un an et demi que les pays « de première ligne », frontaliers de l'Ukraine ou très proches - la Pologne en tête, mais aussi la Hongrie, la Slovaquie, la Bulgarie et la Roumanie - demandent à l’UE d’intervenir. Cependant, tant que le malaise se cantonnait à l’Est de l’Union, Bruxelles a préféré faire l’autruche.
Puis, au début de l’année 2024, quand l’agacement s’est mué en colère, et que les manifestations d’agriculteurs ont déferlé sur toute l’Europe, y compris en France, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Pologne, en Espagne, en Italie et en Grèce, la Commission européenne s’est résolue à bouger. Pas question, toutefois, de mettre fin aux mesures de libéralisation.
Le 31 janvier dernier, l'exécutif européen a proposé de les prolonger, de juin 2024 jusqu’en juin 2025, mais cette fois assorties d’un « frein d’urgence ». Ce mécanisme prévoit la réintroduction temporaire de droits de douane si les importations de trois produits jugés « sensibles » - volaille, œufs et sucre - dépassent les niveaux moyens de 2022 et 2023.
De premières concessions jugées insuffisantes par les organisations agricoles de l’UE, ainsi que par la Pologne et ses alliés, qui font valoir que lors de ces deux années de référence, les importations avaient déjà explosé. Récemment rejoints par la France, première puissance agricole de l'UE, ce groupe a ensuite obtenu un durcissement du texte Les institutions de l’UE se sont finalement entendues, mercredi 20 mars, pour ajouter l’avoine, le maïs, le gruau et le miel au trio initial de produits sensibles.
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